La fiducie foncière de Floride (Florida Land Trust) est-elle une bonne solution pour les canadiens?

Par Meghan L. Weinstein
22 juin 2014

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Il est parfois conseillé aux américains de détenir leur propriété américaine à usage personnel par l’entremise d’une fiducie foncière de Floride (Florida Land Trust). Si elle est correctement mise en place, cette solution peu coûteuse permet effectivement d’éviter les problèmes liés au probate et à l’incapacité. Appliquée à un Canadien, une telle fiducie conserve les avantages précités mais pose en revanche d’autres problèmes majeurs.
Qu’est ce qu’une fiducie foncière de Floride?

Une fiducie foncière de Floride est une fiducie constituante révocable créée pour détenir un titre de propriété en Floride. Elle est inspirée de la fiducie foncière de l’Illinois qui existe depuis plus de 100 ans et qui a pour objectif principal de garantir l’anonymat du propriétaire. Les fiducies foncières divergent des fiducies révocables et irrévocables de common law en ce que le fiduciaire détient à la fois le titre de propriété légal et effectif au sens du droit d’equity en common law. De plus, le fiduciaire ne se voit attribuer que des tâches d’ordre administratif, les autres décisions étant prises par les bénéficiaires.

Protection à l’égard des créanciers

La fiducie foncière de Floride permet de garder vos intérêts privés et confidentiels puisque votre nom n’apparaît pas au registre public. Bien que cet anonymat puisse éloigner les créanciers, l’acte de fiducie en lui-même ne les empêchera pas de saisir les biens détenus par la fiducie dans le cas où les noms des bénéficiaires seraient portés à leur connaissance. De plus, au décès des bénéficiaires ou une fois que la propriété a été distribuée, la fiducie n’offre aucune solution de planification successorale faisant ainsi tomber les éventuelles barrières protectrices contre les créanciers.

Double imposition

Les Canadiens propriétaires de biens immobiliers aux États-Unis sont potentiellement assujettis aux impôts américains suivants : impôt sur le revenu si la propriété génère des revenus, impôt sur le gain en capital si la propriété est vendue et droits successoraux américains si le propriétaire décède alors qu’il détient le bien en son nom personnel.

Les canadiens sont imposés sur leurs revenus mondiaux quelque soit l’endroit où ceux-ci sont générés. Ainsi, revenus et gains en capital générés aux États-Unis sont imposables à la fois par l’Agence du revenu canadien et l’Internal Revenue Service (« IRS »). C’est ce qu’on appelle la double imposition. Le Traité fiscal entre le Canada et les États-Unis permet cependant aux contribuables d’éviter cette double imposition en faisant valoir leur droit à un crédit d’impôt étranger.

Impôt sur le revenu et sur le gain en capital

Une fiducie foncière de Floride est considérée comme une entité intermédiaire aux États-Unis. Ceci veut dire que l’IRS imposera le bénéficiaire de la fiducie (la propriétaire) sur tout revenu ou gain en capital généré par la propriété détenue en fiducie. Au Canada, cette même fiducie est considérée comme une entité séparée dont le taux d’imposition est le plus élevé. Étant donné que les contribuables ne sont pas les mêmes de chaque côté de la frontière, aucun crédit d’impôt étranger n’est possible dans ce cas, résultant en une double imposition pour le propriétaire canadien.

Droits successoraux américains vs. la règle des 21 ans

En plus de la double imposition sur le revenu ou sur le gain en capital, le paiement de droits successoraux américains au décès résultera également en une perte du crédit d’impôt étranger. Normalement, si des droits successoraux sont dus au moment du décès d’un Canadien possédant un bien immobilier aux États-Unis, un crédit d’impôt étranger sera applicable sur la portion fédérale du gain en capital canadien dudit propriétaire au moment de son décès (“disposition présumée au décès”).

Au Canada, la fiducie foncière de Floride étant considérée comme un contribuable différent, le décès du propriétaire ne déclenchera pas de disposition présumée et aucune taxe ne sera due au Canada même si la propriété a pris de la valeur. Cela pourrait sembler être une bonne nouvelle (aucune taxe due est toujours une bonne nouvelle), il faut garder en tête qu’une fiducie canadienne est supposée s’être départie de ses avoirs tous les 21 ans. Ainsi, la fiducie foncière de Floride devra s’acquitter de l’impôt sur le gain en capital auprès de l’ARC tous les 21 ans si la propriété a pris de la valeur. Une fois encore, cet impôt ne donnera droit à aucun crédit d’impôt étranger.

Si la fiducie foncière de la Floride peut être une structure pertinente pour certains Américains, les Canadiens se doivent d’être prudents à son égard puisque les solutions qu’elle apporte peuvent s’avérer moindre en comparaison des problèmes qu’elle crée. Le Canada a déjà un des taux d’imposition les plus élevé dans le monde, alors pourquoi payer plus? Il est important de consulter un professionnel d’Altro LLP SENCRL avant de mettre en place une structure qui pourrait augmenter votre assujettissement à l’impôt.

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