Vous êtes un contribuable américain et vous possédez des REER ?

Par Jonah Z. Spiegelman
Le 24 septembre 2013

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En tant que conseillers fiscaux transfrontaliers, nous rencontrons souvent des citoyens américains qui vivent au Canada depuis plusieurs années sans bien comprendre leurs obligations fiscales envers les États-Unis. Une situation similaire tout aussi complexe peut se produire pour un citoyen canadien qui a déménagé aux États-Unis pour le travail ou pour sa retraite. Même ceux qui honorent leurs obligations quant aux déclarations de revenu sont souvent surpris de constater les autres déclarations nécessaires afin de rester conforme aux lois fiscales américaines.

Ce blog aborde les règles s’appliquant aux citoyens américains ou au résidents américains pour fins fiscales qui détiennent des Régimes enregistrés d’épargne retraite (REER) canadiens. Comme nous le savons, les REER sont un programme d’épargne gouvernemental en vertu duquel toute somme contribuée au REER est déduite du revenu imposable et où l’augmentation de valeur de l’investissement est différée d’impôt jusqu’au moment où le propriétaire du compte effectue des retraits. Ce programme est fantastique pour les résidents canadiens puisqu’il procure d’importantes économies d’impôt à court terme tout en permettant au régime de retraite avant impôt de s’accroitre en reportant l’impôt au moment de la retraite, moment auquel le revenu du propriétaire (et donc son taux d’imposition marginal) sera probablement plus bas.

Par contre, il y a des complications pour les citoyens américains résidant au Canada qui sont assujettis aux lois fiscales canadiennes et américaines. Plusieurs personnes croient que parce que l’argent fructifie à l’abri de l’impôt au Canada dans les REER, il n’est pas nécessaire de le déclarer et qu’il ne sera pas imposé aux États-Unis. Malheureusement, ce n’est pas toujours le cas. En fait, par défaut, les REERS sont traités par les lois fiscales américaines comme n’importe quel investissement non-enregistré – intérêt, dividendes ou gains sur des fonds d’investissement doivent être déclarés dans le formulaire 1040, sans déduction aucune pour les contributions faites dans une année donnée.

Par contre, il existe une solution en vertu de l’article XVIII(7) du Traité fiscal entre le Canada et les États-Unis (le « Traité »). Depuis 2002, les résidents américains pour fins fiscales sont en mesure de faire un choix de différer l’impôt américain sur la prise de valeur d’un REER. Ce choix se fait en produisant le formulaire 8891 de paire avec une déclaration de revenu déposée dans les délais requis par la loi. Évidemment, l’IRS ne permettra pas de déduction pour les contributions au REER ; malgré cela, puisque les taux d’imposition sur le revenu sont généralement plus élevés au Canada, il n’y aura normalement pas d’impôt dû aux États-Unis après avoir appliquer les crédits d’impôt étrangers pour l’impôt payé au Canada. Il est également important de se rappeler que les REER doivent être divulgués chaque année dans les formulaires FBAR.

Ce choix fait en vertu du Traité est certainement pratique mais que devraient faire les personnes venant tout juste d’apprendre qu’elles avaient des obligations fiscales américaines ? Le problème est que le formulaire 8891 doit être produit de paire avec une déclaration de revenu 1040, redresser sa situation et se conformer aux lois américaines « après coup » peut donc ne pas fonctionner. Par contre, une trilogie de décisions privées (Private Letter Rulings ou « PLRs ») par l’IRS vient clarifier la manière dont l’IRS voit cette situation.

Pour situer le contexte, les PLRs sont des memoranda écrits et publiés par l’IRS en réponse à des demandes spécifiques de contribuables quant à leur situation fiscale (toute l’information personnelle est caviardée avant la publication du memorandum sur le site internet de l’IRS). Bien que ces décisions soient entièrement basées sur des faits spécifiques et propres à une certaine situation et qu’elles ne puissent pas servir juridiquement de précédent dans des dossiers futurs, le raisonnement et l’interprétation que l’IRS fait des règles fiscales peuvent être instructives.

Le 12 septembre 2013, trois PLRs ont été publiées dans lesquelles l’IRS accordait une prolongation à des contribuables afin qu’ils puissent produire le formulaire 8891 et ainsi faire le choix prévu au Traité sans pénalité ou paiement d’intérêt pour le retard. Dans chacun des cas, le contribuable demandait à l’IRS d’utiliser sa discrétion pour permettre la production tardive de son formulaire 8891 relativement à ses REER au Canada. Dans chacun des cas, la prolongation a été accordée.

Bien que chacune de ces décisions étaient basées sur des faits spécifiques, il est important de noter quelques éléments communs aux trois cas. Premièrement, dans chaque cas, le contribuable respectait déjà ses autres obligations fiscales. Ceci peut être un élément pertinent afin de déterminer la manière dont l’IRS considérerait la production tardive du formulaire 8891 – si les déclarations de revenu ont déjà été produites dans les délais, leur amendement faits en vertu du Traité pourrait ne pas autant attirer l’attention de l’IRS.

De manière plus importante, dans chaque cas, l’IRS a pris soin de noter que les contribuables ont agi rapidement après avoir appris qu’il était nécessaire de produire le formulaire 8891. Les contribuables n’ont pas attendu que l’IRS envoie des lettres ou des avis de défaut relativement à leur revenu des REER.

La réglementation permettant à l’IRS d’accorder des prolongations (i.e. Treasury Regulation § 301.9100-3(a)) exige que le contribuable démontre au Commissaire qu’il a agi de manière raisonnable et de bonne foi et que le fait d’accorder sa demande ne sera pas préjudiciable pour le gouvernement américain.

Ce facteur devrait servir d’avertissement à quiconque se trouve dans cette position et se demande encore comment gérer sa situation de non-conformité fiscale américaine. Bien qu’il puisse s’agir de la solution la plus simple et la plus économique, garder votre tête dans le sable risque de ne pas attirer la sympathie de l’IRS à votre égard lorsque votre délinquance fiscale sera portée à leur attention. Au contraire, reconnaître une erreur de bonne foi et prendre les moyens nécessaires pour y remédier jouera en votre faveur et permettra à l’IRS se montrer un peu plus clémente à votre égard.

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