Les avantages de détenir sa propriété américaine dans une fiducie

Par Bonnie L. Altro
Le 24 juillet 2014

down-arrow

Détenir une propriété américaine en son nom personnel est la solution la plus commune, simple et la moins onéreuse. Il faut cependant être conscient que la détention en son nom personnel peut causer de graves problèmes et l’absence de planification peut avoir des conséquences coûteuses.

Éviter l’homologation (probate) et les procédures de mise sous curatelle.

L’homologation est la procédure judiciaire qui permet de transférer votre titre de propriété à vos enfants ou vos bénéficiaires à votre décès. En vertu des lois de la Floride, les coûts de cette procédure peuvent s’élever à environ 3% de la juste valeur marchande des avoirs situés en Floride au moment du décès. Ainsi, pour une propriété en Floride achetée au prix de 200 000$, les frais et coûts de l’homologation seront d’environ 6,000$USD. Il faut aussi garder à l’esprit que la propriété en question aura sans doute pris de la valeur au moment du décès ce qui résultera en une augmentation des coûts liés à l’homologation.

Une autre problématique reliée à la détention personnelle d’une propriété immobilière aux États-Unis est celle de la procédure de mise sous curatelle privée si vous êtes déclaré inapte. La mise sous curatelle est une procédure judiciaire en vertu de laquelle une personne n’ayant pas la capacité de gérer certaines fonctions de sa vie quotidienne est déclarée inapte par un tribunal et perd le droit de prendre certaines décisions. Le juge doit constater l’inaptitude et déterminer s’il est nécessaire de nommer un curateur légal pour exercer les droits en matière de prise de décisions qui ont été retirés. La procédure de mise sous curatelle exige une représentation juridique et peut être coûteuse.

L’homologation ainsi que la mise sous curatelle étant des procédures longues et qui gèlent les biens immobiliers, la mise en place d’une structure de détention de propriété américaine est préférable afin de les éviter.

Réduction des droits successoraux américains.

Les Canadiens possédant des actifs aux États-Unis peuvent être assujettis aux droits successoraux américains. Cet impôt est basé sur la juste valeur marchande de tous les actifs américains possédés au moment du décès. Il peut atteindre jusqu’à 40% en fonction de la valeur de l’actif américain et celle de la valeur du patrimoine mondial.

Cependant, tous les Canadiens possédant des actifs américains ne sont pas assujettis aux droits successoraux américains. A ce jour, la loi prévoit que l’assujettissement d’un Canadien aux droits successoraux américains dépend des deux facteurs suivants :

1. La valeur du patrimoine américain est-elle supérieure à 60 000USD ? et
2. La valeur de leur patrimoine mondial est-elle supérieure à 5 340 000USD ?

Si la réponse est positive à la première question mais négative à la seconde, alors les Canadiens sont exemptés de payer des droits successoraux américains. Le montant d’exonération de 5 340 000USD est propre à l’année 2014 et augmente d’année en année en fonction de l’inflation.

Ainsi, si un Canadien possède une résidence secondaire aux États-Unis valant 200 000$, mais que son patrimoine mondial vaut 1 000 000$, aucun impôt ne devra être payé aux États-Unis au décès de cette personne.

Il est important de noter que tout est inclus dans le calcul du patrimoine mondial d’un Canadien, y compris les REER et les assurances vies. Toutefois, l’IRS n’impose pas le patrimoine mondial à 40% mais bien seulement la valeur des actifs américains.

Une solution potentielle : La fiducie révocable transfrontalière (Cross Border Trust)

Pour réduire les droits successoraux américains lorsqu’ils s’appliquent et pour éviter les problèmes expliqués précédemment, nous recommandons souvent à des individus et des couples d’acheter leur propriété américaine dans une fiducie révocable transfrontalière.

Pour les couples mariés, une fiducie révocable transfrontalière est mise en place pour chaque époux. Chaque fiducie transfrontalière détiendrait alors 50% de la propriété. Les fiducies révocables transfrontalières sont organisées de telle sorte que lors du décès du premier époux, les 50% de la propriété sont légués au bénéfice de l’époux survivant sans faire partie de sa succession. Par le fait même, le conjoint survivant ne possède que 50% de la propriété. Lors du second décès, la propriété dans les fiducies se divise alors en deux parties égales à partager entre les enfants et les autres héritiers.

Avec la mise en place de fiducies révocables transfrontalières, on évite les dépenses relatives à l’homologation et à toute procédure relative à la propriété aux États-Unis comme au Canada. En plus de réduire l’impact des droits successoraux, la structure de la fiducie transfrontalière protège aussi les bénéficiaires subséquents contre les créanciers et/ou contre leurs ex-conjoints afin qu’ils ne puissent exercer aucun droit à l’encontre de la propriété détenue par la fiducie.

Enfin, les actifs de la fiducie révocable transfrontalière ne sont généralement pas assujettis à la juridiction de la cour dans l’éventualité où l’un des conjoints devenait inapte. Plutôt que de passer par la procédure judiciaire de curatelle privée (guardianship), la fiducie transfrontalière permet au fiduciaire successeur d’intervenir et de venir gérer les actifs de la fiducie sans intervention de la Cour.

Dans la fiducie révocable transfrontalière de chacun des époux, l’époux en question agit à titre de constituant, fiduciaire et bénéficiaire tandis que l’autre époux a le rôle de co-fiduciaire. Tant que le constituant est en vie, personne d’autre n’est impliqué dans la fiducie transfrontalière. Il n’y a pas d’obligation de faire des déclarations fiscales à l’IRS ou à l’Agence du Revenu du Canada (CRA) sauf en cas de revenu locatif. Il n’y aura aucune obligation d’avoir un comptable ou un avocat pour l’administration ou l’entretien annuel. Une fois mise en place pour la première propriété, la fiducie est prête à recevoir toute autre propriété achetée aux USA sans modification ni frais supplémentaires. Si le couple ne possède plus de propriété aux États-Unis, la dissolution, la liquidation ou le recours à des services juridiques et comptables ne sont pas nécessaires. Puisque la fiducie transfrontalière est révocable, il est possible de modifier ou supprimer des clauses.

De plus, en cas de vente d’une propriété détenue par la fiducie révocable transfrontalière, les profits de la vente reviendrait directement à son bénéficiaire et non pas à la fiducie.

Le CBT et les déductions sur la valeur

L’IRS fonde le montant des impôts sur la juste valeur marchande de l’actif. La juste valeur marchande est définie comme le prix qu’un bien rapporterait lors d’une vente effectuée sans contrainte ni restriction, entre un acheteur et un vendeur consentant. La juste valeur marchande est souvent une zone grise, rendant la valeur de l’actif et le montant de l’impôt contestables.

Les déductions sur la valeur peuvent sensiblement diminuer la valeur d’un actif et donc réduire l’impôt. Ils s’appliquent à l’immobilier et aux entreprises en fonction de la structure de détention de l’actif. Prenons l’exemple d’un couple marié, Pierre et Céline, propriétaires d’un condo en Floride d’une valeur de 1.5 millions de dollars américains dans deux fiducies révocables transfrontalières. Le patrimoine mondial de Pierre et Céline est estimé à 15 millions, de sorte qu’ils sont assujettis aux droits successoraux américains. Si Pierre tente de vendre ses 50% sur le marché, il ne sera probablement pas en mesure de trouver acheteur puisque que ceux-ci souhaitent rarement posséder un bien sur lequel ils n’ont aucun contrôle. Par exemple, si l’acheteur souhaite par la suite vendre la propriété, Céline qui détient les 50% restants ne sera peut être pas intéressée.

Considérant que Pierre aura sans doute des difficultés à trouver acheteur, le marché lui offrirait alors moins de 50% de la valeur totale. Pourquoi alors la succession de Pierre (ou celle de Céline si elle décède la première) serait elle imposable sur les 50% ?

Selon notre expérience et nos recherches en la matière, lorsque la propriété est détenue par deux fiducies révocables transfrontalières distinctes, l’IRS accorde une déduction sur la valeur à hauteur de 20 à 33%. Notre approche conservatrice nous pousse à utiliser la valeur de 20%.

Ainsi grâce aux déductions sur la valeur applicables lorsque la propriété est détenue par deux fiducies révocables transfrontalières, le patrimoine de Pierre peut être réduit à 600 000$, c’est-à-dire 750 000$ moins 20%. Cela aura pour effet de réduire le montant des droits successoraux américains à payer. Évidemment la provenance des fonds pour l’achat initial doit être prouvé afin d’éviter les conséquences de l’article 2040 a) de l’Internal Revenu Code et toute considération de dons ou de taxation à 100% au premier décès.

Conclusion

La planification successorale américaine peut être très utile afin d’éviter les conséquences négatives propres à certains modes de détention d’actifs. Bien entendu, la structure appropriée ne pourra être déterminée qu’une fois les faits établis. Cependant la fiducie transfrontalière révocable est une excellente stratégie à envisager pour les Canadiens, propriétaires aux États-Unis.

Rencontrez votre équipe juridique:
Demandez une consultation